Quand j’ai commencé à travailler sur mon projet de fin d’études en 2014 , j’ai demandé à 20 personnes que je ne connaissais pas leur définition d’un souvenir. Bien sûr, tout le monde n’avait la même. Il peut être immatériel, comme un « souvenir mental de bons moments passés avec mes parents » a déclaré Neil (58 ans). Pour certains, comme Robin (20 ans), il s’agit « plus d’un objet ancien que d’un souvenir mental », comme un petit objet bon marché d'une boutique de cadeaux.
Pour Ben (26 ans), ce sont les souvenirs personnels et collectifs des expériences antérieures: « [...]c’est ce qui reste après un événement auquel on a participé: une photo, un dessin, une marque, des choses oubliées, des sons enregistrés ... » a-t-il dit. Une fille dans la trentaine a conclu: «C’est quand vous immortalisez un moment dans le temps. »
En fait, cela peut être soit un souvenir mental, soit un objet qui sert à se rappeler d’un souvenir.
Les souvenirs sont créés par la mémoire. Les sens humains (la vue, le goût, l’odeur, le toucher et l’ouïe) réagissent aux stimulus et transforment les informations en un signal qui est lu, adapté et stocké dans nos souvenirs.
Ces derniers sont intimement liées à nos connaissances et à nos expériences de vie. Ils sont entourés de contexte, comme la date, le lieu et l’état émotionnel. Ils sont stockés et on s’en rappelle lorsqu’ils sont ravivés. Les objets anciens ayant de la valeur émotionnelle éveilleront des souvenirs. Comme la boule de neige qui se trouve sur votre étagère : elle pourrait sembler sans valeur, mais ce n’est pas le cas. Parce qu’elle vous rappelle un grand moment. Ces artefacts peuvent se présenter sous plusieurs formes : objet, image, vidéo, chanson, dessin, album...
Depuis l’Antiquité et la grotte de Lascaux (l’un des plus anciens témoignages d’« enregistrement » d’événements), les hommes ont capté leur vie, créant ainsi des moyens de réveiller leurs souvenirs. Les dessins et l’écriture étaient les premiers moyens significatifs utilisés pour stocker et ses rappeler d’événements.
Avançons jusqu’à l’invention de la photographie et plus tard des salles obscures : le progrès a permis de capturer des sorte de « souvenirs haute-fidélité », où la représentation ne dépend plus de l’interprétation personnelle. Elle est plus précise et plus réaliste, mais elle peut être sujette à des problèmes technologiques et à des choix — être surexposé par exemple. Aujourd’hui, les dispositifs pour capturer ce type de souvenirs sont couramment utilisés : appareils photo, microphones, smartphones...
La technologie a rendu vraiment facile la capture de souvenirs. Les smartphones permettent désormais à la fois de capturer et de partager / diffuser des souvenirs. Toutes les anciennes limites disparaissent rapidement, et les outils deviennent meilleurs tous les jours. Les fabricants ont proposé une caméra frontale sur leurs smartphones pour faciliter les appels vidéo. Mais en fin de compte, elle est probablement plus largement utilisée pour prendre des selfies, une des dernière tendance dans le souvenir !
En ce qui concerne la capture, un autre exemple est celui de Narrative (initialement appelé Memoto) — il s’agit d’un petit dispositif connecté, qui permet le lifelogging. Chaque 30 secondes, une image est prise, envoyée sur internet pour être stockée et taguée avec des renseignements de localisation recueillies grâce à un capteur GPS.
Cette tendance du lifelogging est dérivée du quantified self. En capturant chaque instant, on peut être sûr de ne jamais manquer un moment important.
Mais non seulement la technologie a un impact sur la façon dont nous capturons des souvenirs, mais elle permet également de restituer les souvenirs de façons nouvelles et créatives. Prenez Touchable Memories par exemple, un projet porté par l’entreprise Lola de Singapour. En utilisant l’impression 3D, des images 2D sont transformées en sculptures, rajoutant un sens (toucher) à l’expérience du souvenir. Cela permet également aux aveugles de faire l’expérience de « toucher un souvenir » (Fig. 5).
La capture 3D permet également de reproduire des souvenirs collectifs, comme les bâtiments historiques. Par exemple dans le but de préserver l’ancien Arc de Palmyre, qui fut détruite en 2015 par l’État islamique. L’arc a été préservé avant sa destruction, et sera reconstruit à l’aide d’une imprimante 3D géante. En 2012, un hologramme du rappeur Tupac était diffusé en direct sur scène à Coachella. Le public a pu vivre une expérience proche de celle du concert en direct.
À l’échelle individuelle, Digiteyezer permet à quiconque de construire une version miniature d’eux-mêmes à l’aide d’une capture 3D du visage.
Il y a beaucoup plus d’exemples... Cette technologie a déjà considérablement changé la manière par laquelle nous conservons des souvenirs, en améliorant la façon dont nous recueillons des souvenirs et en réduisant toutes sortes de limitations (temps, espace, partage...).